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A/s La nuit ne se tait pas, de Danièle Corre (Éditions Tensing, 92 p, 9 € -mars 2013)

 (par Martine Morillon-Carreau, Revue 7 à dire n° 59 Janvier-février 2014)
 

C’est la lumière, le jour, le soleil - « un jeune soleil sans mémoire »,  qui semblent hanter La nuit ne se tait pas, le dernier recueil de Danièle Corre. De l’exergue, emprunté à G-E. Clancier jusqu’au poème ultime, l’auteure, avec cette belle « impatience », cette « saveur gourmande de vivre » qui la portent et nourrissent son écriture, y regarde briller à loisir les « éclats de soleil sur la rivière », le « soleil [qui] scintille sur la vallée » ou le « jeu du soleil sur les branches ». Instants privilégiés (que D. Corre sait si bien évoquer) de « vivante braise sous la cendre », où « la vie a parfois/ un goût de frangipane... »

Paradoxe ? Nullement. Certes la lumière chante haut dans La nuit ne se tait pas, mais l'auteure la convoque pour tenter de mieux lutter contre " la nuit/ qui ne cède pas " lorsque " l'alerte cogne / de tous ses gongs/ aux parois du sang ". Avec, " au cœur du chaos ", "une"visibilité intacte/ sur l'arête des roches/ et les gestes de cruauté " ! La lumière alors en effet s'éteint, au cœur des matières les plus précieuses de la vie - qui se corrompent, s'abolissent : " Il ne reste plus/ que cailloux morts/ dans nos réserves/ de pierreries " et " les heures lasses/ [...] se glissent perfides/ entre les joies/ d'or terni ".

À cause de ces blessures de l’existence, il n’est pas donné d’emblée à ceux qui viennent « de plus loin/ que le chagrin » de « gagner les chemins clairs », puisqu’ils « n’en finissent pas de nous attendre ». Ainsi, « protéger les lumières » devient le but de toute une vie, le fruit de toute une sagesse et d’une longue patience. Car, « Si tu accueilles/ le temps/ dans sa lenteur » nous révèle D. Corre, « tu garderas le talisman/ qui t’a été confié ». Peut-être cette invincible joie de vivre qui fait dire au poète : « j’appartiens au rire ». Sans doute aussi cette faculté d’amour, d’accueil, d’ouverture poétique, qui illumine (ses amis le savent bien) la relation de Danièle à autrui. En particulier bien sûr à l’homme aimé, qui, dans l’avant-dernier poème, lyrique, inspiré, suscite cette fervente adresse : « Je t’attends dans la main du monde/ paumes ouvertes ». Car, même si la poète mesure l’ampleur de la tâche, l’« effort pour détourner l’orage/ de notre abri », oui, l’espoir lumineux l’éclaire, ici et maintenant : « Le jour nous travaille /au présent ».

(Martine Morillon-Carreau, Revue 7 à dire n° 59)

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