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Jean-Claude Martin, Que n'ai-je, 2016, Tarabuste, 13 €.

   Prête-t-on assez souvent attention aux épigraphes des livres ? Celui-ci - dix-neuvième du poète - est placé sous l'égide et exergue du dernier quatrain de « La blanche neige » d'Apollinaire (« Le cuisinier plume les oies/Ah ! tombe neige/Tombe et que n'ai-je/Ma bien-aimée entre mes bras »). Emprunt qui suggère, par ce jeu sonore, tout à la fois - palimpseste à regratter - un regret et cette constatation mélancolique de vanité : tout n'est que neige... Patronage significatif (le titre du recueil reprenant de plus celui de sa troisième partie) pour un livre au charme à la fois mystérieux et fantaisiste. Mystérieux, car la logique narrative potentiellement anticipée fait souvent défaut : « Ton poignet se brise comme un lac trop fragile. On a mis le ciel à sécher sur sa corde ». Ce type de coq à l'âne poétique, très apollinarien, en nous projetant dans un monde d'associations autres, étranges, décalées, loin des clichés, nous ouvre à un univers personnel, où les images sensibles et mélancoliques ne sont pas dénuées d'humour, tel, automnal, ce « sous-bois de pensées mortes ». Et la fantaisie du poète s'exerce même volontiers en des jeux sonores comme : « Le fond de l'air est frais. Le fond de l'air effraie ». Jean-Claude Martin, qui alterne « je » et « tu » lorsqu'il parle de lui ou se parle, met ainsi à distance lucide les évocations douloureuses (« N'attends rien [...]/Ne compte pas [...]/N'espère rien [...] » ou « Tu te croyais un destin ? » ou encore « Tu t'en vas, tu t'en vas... » ) mais implique ainsi davantage le lecteur, convié à voir avec lui « /es nuages [qui] tombent comme des pierres ».

                                                                                                                                     (par Martine Morillon-Carreau,Poésie/première 66)


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